ÐÏࡱá>þÿ  þÿÿÿ   ÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿì¥Á5@ ð¿ZÀbjbjÏ2Ï2 .Ä­X­XùNÿÿÿÿÿÿˆÄÄÄÄÄÄÄÊ’ ’ ’ 8Ê ŒV$Ê©&x††(®®®®®®˜"š"š"š"š"š"š"$!(Rs*n¾"¥Ä®®®®®¾"ÄÄ®®c&¢!¢!¢!®þĮĮ˜"¢!®˜"¢!f¢!"ÄÄ"®z :p8^ÂÄ’ ¬ ¾"|"y&0©&"á*j!"á*"Ø”l^ÄÄÄÄá*Ä"t®®¢!®®®®®¾"¾"Êʤn $Œ!ÊÊn L’architecture Renaissance en Croatie I. Introduction – un territoire pour destin Soutenu par des circonstances politiques et historiques particulières, le clivage politique et culturel séculaire du territoire croate entre la bande littorale sur l’Adriatique et l’arrière-pays continental va connaître son épilogue aux XVe et XVIe siècles. La prise de possession de la majeure partie de la rive orientale de l’Adriatique par Venise dans les premières décennies du XVe siècle et l’avancée progressive des Turcs, qui s’emparent d’une vaste zone de la Croatie continentale, ne vont pas seulement séparer pour près de quatre siècles les destinées des régions du royaume croato-dalmate jadis politiquement unifié (Regnum Croatiae, Sclavoniae et Dalmatiae) ; elles vont également conduire ces régions, autrefois ouvertes sur des espaces de cultures, de traditions et de civilisations diverses, à se tourner complètement vers les centres divergents : la Croatie côtière vers les terres de l’autre rive de l’Adriatique et la Croatie continentale vers l’Europe centrale et les palais de Buda et de Vienne. Tandis que la seconde moitié du XVe et la première moitié du XVIe siècle seront pour la Croatie côtière une période de progrès intensif et de prospérité, en Croatie du nord, la menace constante du danger ottoman puis la réduction progressive d’un territoire vont non seulement stopper mais encore faire régresser le développement social et économique. Bien qu’elle soit présente dans tous les secteurs de la vie, cette situation se répercutera peut-être plus qu’ailleurs dans le domaine architectural. Dans la Croatie continentale du XVIe siècle confrontée à la nécessité de survivre, de préserver son existence et réduite aux « reliques des reliques » (reliqiuae reliquiarum), l’architecture du nouvel âge Renaissance sera presque exclusivement liée à une forme simple, extrêmement fonctionnelle et utilitaire : la fortification. Au Sud, cependant, les communes médiévales dalmates, portées par un nouvel esprit d’entreprise et par l’essor économique général, connaissent une véritable renaissance au cours de la seconde moitié du XVe et au début du XVIe siècle, malgré la compromission politique et une dépendance presque coloniale vis-à-vis de la « Reine de la Mer ». L’activité artistique florissante et l’intensité particulière des chantiers de construction laissent dans les villes de Dalmatie des traces évidentes d’un essor social généralisé. Voilà pourquoi après l’Antiquité, les siècles de la Renaissance apparaissent vraiment comme une période de reconstruction et de régénération sur toute la longueur du littoral oriental de l’Adriatique, de l’Istrie jusqu’à Kotor. La construction de nouveaux remparts ou la restauration de murailles anciennes dessinent alors de façon définitive les silhouettes encore identifiables aujourd’hui des villes médiévales dalmates. En plus de nombreuses maisons privées et de palais, de bâtiments publics importants et d’éléments de l’infrastructure communale ( murailles et tours, vastes citernes et loggias municipales ( on bâtit et on termine à cette époque trois grandes cathédrales, des collégiales et des paroissiales, ainsi qu’une quantité d’édifices de culte de taille plus modeste mais tout aussi prestigieux. C’est justement la construction de ces très nombreuses églises, bien davantage que les bâtiments publics, les maisons et les palais, qui permet de mettre en évidence les conceptions esthétiques les plus novatrices et les plus modernes. C’est à l’architecture religieuse, qui véhicule les valeurs collectives et symboliques de la société de la fin du Moyen Age, qu’on peut attribuer le mérite principal de l’affirmation du nouveau style. Outre le fait qu’elle reflète les hautes capacités professionnelles et artistiques des bâtisseurs et des sculpteurs, l’architecture religieuse témoigne de l’existence de commanditaires et de mécènes, éduqués dans le nouvel esprit et sensibles aux valeurs de l’Antiquité classique, qui encouragent la nouvelle expression artistique. Engagés et volontaires, investissant des sommes importantes, faisant venir des maîtres étrangers et leur soumettant de nouvelles tâches, ces quelques individus cultivés, plus fréquemment d’ailleurs de hauts dignitaires ecclésiastiques que des laïcs, contribuent de façon décisive à la création des monuments-clefs de l’architecture Renaissance croate. Il convient de plus de souligner qu’au cours du XVe siècle, le processus d’adaptation et d’acceptation du nouveau style se déroule pratiquement de la même façon en Croatie que dans les autres régions situées dans l’orbite de la Toscane. Suivant le cours global de l’expansion et du développement du style au début mais aussi plus avant dans le quattrocento, le style Renaissance est d’abord compris et accepté sur le littoral croate de l’Adriatique comme un système varié de formes décoratives, et c’est conduit par les idées de richesse, de diversité et de prestige, au départ simplement et presque naturellement lié au gothique tardif, qu’il se manifeste sur les anciennes structures architecturales. De ce fait, l’architecture Renaissance se dévoile principalement par la présence d’un nouveau répertoire de motifs d’origine classique, travaillé par les tailleurs de pierre et les sculpteurs, et non à travers des œuvres d’architecture complètes aux formules typologiques différentes et présentant les structures spatiales correspondantes. Dans ce large panorama, il faut absolument souligner la place singulière et unique de la Cité-République de Dubrovnik qui va, à la faveur de son indépendance politique et d’une prospérité économique significative, affirmer une conscience cosmopolite, tant dans l’accueil des maîtres étrangers que dans la reconnaissance, la sauvegarde et le développement de certains cadres de vie propres, enracinés dans la tradition. La position exceptionnelle de cette ville-Etat autorise l’adoption très précoce des expériences florentines les plus nouvelles, aussi bien dans la construction des fortifications que dans la mise en pratique du vocabulaire ornemental de l’architecture Renaissance. Elle permet aussi l’élaboration d’un climat social où le phénomène d’abord local de l’architecture de villégiature, soutenu par la pensée humaniste, va acquérir une réalisation plus complète et plus concrète, avant de la dépasser pour devenir un phénomène plus vaste, d’importance européenne. Pour finir, il convient de souligner que viennent de Croatie Luciano Laurana, l’architecte du palais ducal d’Urbino, Francesco Laurana, le sculpteur et architecte de cour d’Alphonse V d’Aragon au palais de Naples, ainsi que, selon toute vraisemblance, Marko Cedrino, le constructeur de la grande basilique fortifiée de Lorette, et Giorgio Spavento, l’architecte de l’église San Salvatore de Venise. II. Le siècle de l’architecture Renaissance sur le littoral Adriatique (1450-1550) – villes, maîtres et commanditaires En 1453, alors même que la nouvelle de la chute de Constantinople aux mains des infidèles se propage dans l’Occident chrétien, suscitant peur et appréhension, le noble vénitien Maffeo Valereso (1450-1495), qui est archevêque de Zadar, envoie à son ami Hermolao Barbaro, évêque de Trévise, une lettre où il lui demande de lui envoyer les dessins des « feste romane » de Donatello, afin de pouvoir décorer son palais dont la construction vient juste de commencer. Le palais archiépiscopal n’existe plus de nos jours, mais de multiples fragments sculptés d’encadrements de fenêtres et de balcons, ornés de têtes de béliers reliées par des guirlandes, de bucranes et d’autres motifs, témoignent du fait que l’évêque de Trévise avait accédé à la prière de son ami et que la restauration de l’esprit classique et l’évocation des grandeurs de l’Antiquité ont débuté à Zadar, l’antique Jadera, presque au même moment qu’en Italie du nord (fig. 1). Bien qu’il n’y ait aucun lien entre ces deux événements de l’histoire mondiale et de l’histoire locale, chacun va déterminer à sa manière les deux principaux aspects sous lesquels l’architecture Renaissance débutante se manifestera sur le sol de la Croatie, et dans le cadre desquels elle se maintiendra, par un concours de circonstances politiques et historiques particulières, pendant près de deux siècles. D’une part, et cela vaut par exemple pour la Croatie continentale du nord au XVIe siècle, on aura plutôt affaire à l’adresse des planificateurs de guerre et des stratèges, qui sont fréquemment des ingénieurs militaires étrangers, qu’à de l’art – métier mis au service de la protection du territoire et de la survie pure et simple. D’autre part, dans les villes de la côte orientale de l’Adriatique, le nouveau style apparaît d’abord sous les doigts de tailleurs de pierre et de sculpteurs locaux très habiles, dans les formes du répertoire moderne, conçu all’antica, du décor architectural, avant de s’incarner avec le temps dans le cours général de la vie quotidienne de l’ensemble de la société. C’est entre ces deux extrêmes – les longues courtines nues des murailles et les volumes purement stéréométriques des bastions, d’un côté, et, de l’autre, les riches ornements architecturaux sculptés et peints des fenêtres et des portails – que sont élaborées la plupart des œuvres qui marquent l’apparition du nouveau style architectural dans les régions qui forment la Croatie actuelle. La proximité immédiate de la péninsule italienne, les multiples liens durables, politiques, commerciaux et culturels, qui existent entre les deux rives de l’Adriatique, et en particulier avec les foyers de l’humanisme précoce en Italie que sont Padoue et Venise, vont permettre de créer dans certaines villes dalmates un terrain fertile, où pourront germer un certain nombre de réalisations importantes pour l’architecture de la haute Renaissance européenne. Ainsi l’architecture Renaissance pénètre au milieu du XVe siècle sur le littoral Adriatique de la Croatie, à grande échelle et dans des proportions plus réduites. Les différentes circonstances de son apparition, les tâches variées qu’on lui impartit, et les conditions diversifiées du développement architectural Renaissance le long du littoral Adriatique au cours des quelque cent années suivantes, vont nécessairement créer un tableau d’ensemble assez bigarré. Le nouveau style artistique est agréé par les centres urbains développés de la zone côtière de la Croatie ; comme il s’agit de collectivités communales plus ou moins autonomes, fondées sur les principes de la municipalité, en même temps que de très anciens sièges épiscopaux, on peut difficilement évoquer un processus unique et universel selon lequel l’architecture Renaissance grandirait et se développerait sur la rive orientale de l’Adriatique. Soumise aux circonstances sociales et économiques internes spécifiques à chacune de ces villes, la dynamique de croissance et de développement du nouveau style dans la large zone littorale de la côté est de l’Adriatique ne présente par conséquent ni traits communs particuliers, ni rythme uniformisé. En outre, au milieu du XVe siècle, la Renaissance pénètre dans l’espace adriatique de la Croatie qui n’est ni politiquement ni culturellement unifié. Trois grandes entités représentent cependant des régions à peu près indépendantes sur l’Adriatique : la République de Dubrovnik en Dalmatie méridionale ; la Dalmatie vénitienne qui occupe l’espace de la Dalmatie centrale et septentrionale ; le littoral croate du Nord-Est et l’Istrie, directement influencés par Venise et qui se retrouvent quelque peu détachés des deux ensembles précédents. Ces régions – c’est particulièrement important – reçoivent les nouvelles impulsions stylistiques depuis des sources distinctes, à des moments différents. Bien que l’activité diversifiée d’artistes éminents et de nombreux ateliers de sculpteurs fasse très rapidement le lien entre les zones nord, centrale et sud de l’Adriatique, et que l’unification du nouveau lexique stylistique supprime les différences visibles les plus importantes qui existaient entre elles, les particularismes régionaux de ces trois grandes entités ne seront pas maîtrisés de manière significative. Au contraire même, quand le processus se terminera, au début du XVIe siècle, ils s’exprimeront avec encore plus de force. Si l’on tient compte du rythme de la création et de la concentration des œuvres les plus importantes de l’architecture Renaissance, on peut établir que le nouveau style se diffuse apparemment du sud vers le nord de la côte adriatique, dans le cadre d’un développement en trois phases : au début, vers le milieu du XVe siècle, il apparaît sporadiquement le long de l’ensemble du littoral, un peu plus tôt avec plus d’intensité à Dubrovnik, et plus faiblement en Istrie ; ensuite, lorsque s’affirment les ville de Dalmatie moyenne (Šibenik et Trogir) dans les années 1460 et 1470, il s’étend également aux autres centres urbains, pour finalement embrasser le territoire de la côte septentrionale de la Croatie et l’Istrie dans les dernières décennies du quattrocento. Le cercle ragusain des maîtres venus de Florence – l’apparition de la Renaissance en Dalmatie Deux ans après la prise de Constantinople, le Sénat ragusain, conscient des nouvelles circonstances géopolitiques et du possible développement des événements en Italie dans le futur, sollicite les services d’un habile fondeur d’armes, qui est alors le profil d’artisan d’art le plus recherché. Le noble Marin Tomasov, un des plus illustres représentants de la colonie de marchands ragusains établie à Florence, s’était illustré comme mécène à l’occasion de la construction de l’église Santa Annunziata dans la capitale toscane ; il conclut en 1455 un accord avec le fameux bronzier Maso di Bartolomeo. L’artiste florentin, proche collaborateur du célèbre sculpteur et bâtisseur Michelozzo di Bartolomeo, arrive la même année à Dubrovnik afin d’y fondre des bombardes. Le maître-bronzier décède accidentellement en 1456, peu de temps après son arrivée à Raguse, lors de l’essai d’un de ses canons. En cette même année 1456, les délégués du monastère dominicain s’accordent avec des tailleurs de pierre locaux pour faire réaliser l’aile est de leur cloître suivant une idée et des dessins de Maso di Bartolomeo, qu’on leur permet de modifier pour le rendre encore « plus beau et meilleur ». Les colonnes aujourd’hui lisses, primitivement prévues pour être polygonales ou plus probablement cannelées, et les chapiteaux existants avec leur luxuriant décor végétal, attestent que l’on a retravaillé les dessins de Maso dans l’esprit du gothique tardif. Du projet originel, on ne reconnaît actuellement que les motifs géométriques des grilles, elles aussi modifiées, des oculi complexes, disposés dans les écoinçons des arcades au-dessus des colonnes ; les transformations importantes des dessins primitifs ont évidemment été une condition préalable pour que le nouveau style soit accepté (fig. 2). Malgré son orientation cosmopolite et son ouverture très précoce aux idées de l’humanisme du XVe siècle, la société ragusaine manifeste ainsi un goût relativement conservateur dans sa perception du nouveau style. Ce fort attachement aux traditions et aux habitudes esthétiques du Moyen Âge complique durablement l’accueil et ralentit l’essor des formes stylistiquement plus pures et plus complètes de l’ornementation Renaissance ; le style métissé gothico-Renaissance nouvellement élaboré devient pour près d’un siècle dominant dans la production architecturale sur le territoire de la République de Raguse. Ce cas de modification d’un projet artistique, exceptionnel en ceci qu’il est confirmé par des documents, témoigne de la difficulté et de la lenteur avec lesquelles les nouvelles formes ont commencé à percer. D’ailleurs les développements ultérieurs montrent que cette évolution ne s’est faite ni facilement ni rapidement. D’un autre côté, la diffusion et la quantité des édifices de ce style métissé gothico-Renaissance, qui dépassent grandement le nombre des monuments de l’un ou de l’autre « style pur », ainsi que son maintien durable dans les autres villes côtières de l’Adriatique, suggèrent un phénomène qui dépasse de loin la manifestation habituelle d’un style de transition de caractère éphémère. À Venise même, où il connaît les variantes les plus diverses et des formes somptueuses, il s’éteint au terme du XVe siècle. Un autre artiste florentin vient rapidement remplacer le défunt Maso di Bartolomeo et fabriquer des bombardes à Dubrovnik : son assistant Michele di Giovanni da Fiesole appelé Le Greco. Ce maître, qui a auparavant travaillé sous les ordres de Maso di Bartolomeo au portail de l’église Saint-Dominique d’Urbino, et a ensuite collaboré à la décoration des appartements du Palais ducal de la même ville, accepte à la demande du Sénat ragusain de sculpter entre 1458 et 1460 la fenêtre monumentale, somptueusement ornée, du mur nord du Palais des Recteurs de Dubrovnik (fig. 3). Cette réalisation assez modeste constitue un condensé du répertoire de la décoration de la haute Renaissance florentine, et on distingue dans cette première œuvre complète, élaborée dans l’esprit du nouveau style, un changement de goût minime mais significatif de la société ragusaine. Attiré par le salaire important des ingénieurs militaires, Michelozzo di Bartolomeo en personne entre au service de la République dès l’année suivante. Pendant quatre années complètes (1461-1464) l’illustre architecte et sculpteur florentin, ancien assistant de Donatello, travaille à l’édification des murailles nord et ouest des remparts de Dubrovnik. Suivant les exigences de la guerre moderne qui faisait grand usage de l’artillerie, Michelozzo projette et élève en partie le long du côté terrestre des remparts une série d’imposantes tours rondes où il aménage sur plusieurs niveaux des casemates abritant les pièces d’artillerie. En dehors de la tour Bokar, située à l’extrémité de la courtine occidentale des remparts, et, un peu plus au nord, la fortification encadrant la porte de la ville (dite Porte de Pile) à l angle nord-est des murailles, la plus grande est la tour Min eta (fig. 4), qui impressionne par sa position stratégique remarquable et son importante valeur symbolique. Même si plusieurs autres maîtres, et parmi eux Georges le Dalmate pour les créneaux, ont œuvré à sa construction à la suite du départ de Michelozzo et qu’elle n’a été terminée qu’à la fin des années 1470, on peut dire que la tour Min eta, un des symboles les plus éminents de l esprit libéral de Dubrovnik, a en majeure partie été construite selon les conceptions du célèbre artiste florentin. La série des maîtres venus de Florence formant le cercle ragusain s achève avec un autre collaborateur de Michelozzo, Salvi di Michele, qui participe en tant que protomagister à la restauration du Palais des Recteurs endommagé par une explosion de poudre en 1463, au cours d’un bref séjour à Dubrovnik. Le Sénat ragusain n’ayant pas voulu se prononcer, pour des raisons qui demeurent inconnues, sur le projet de rénovation présenté par Michelozzo, le célèbre artiste quitte Raguse dès 1464. À la suite de quelques petites interventions la même année, les travaux de restauration du Palais ne commencent vraiment qu’à l’arrivée de Salvi di Michele fin 1468. Tenu de respecter au maximum l’état des lieux dans son projet de rénovation du rez-de-chaussée du Palais et de remployer toutes les vieilles colonnes encore utilisables, la contribution directe de l’artiste florentin s’exprime dans les arcades monumentales du portique de façade. Les sculpteurs locaux, André Markovi à leur tête, réalisent une paire de nouveaux chapiteaux des arcades et ajoutent de nombreux détails ornementaux, à l aide de ses modèles en bois grandeur nature (forme facte de legname et alla grandezza delle forme). Tandis que dans la décoration particulièrement riche et tout à fait librement conçue des nouveaux chapiteaux figurés (a fantasia) rien ou presque ne trahit une filiation florentine, on reconnaît dans les arcs magnifiquement décorés qui les surmontent les motifs ornementaux bien identifiables que Brunelleschi utilisait déjà dans l’église de San Lorenzo à Florence (fig. 5). Le séjour des maîtres florentins à Dubrovnik a très tôt ouvert la voie à la percée du vocabulaire moderne de l’architecture Renaissance et à l’apparition des nouveaux motifs all’antica, mais pas toutefois à celles de structures architecturales complètes. Puisqu’ils sont perçus en dehors des systèmes correspondants de conception de l’espace et de proportions, on continue à utiliser tout simplement les éléments de la sculpture architectonique et décorative de style Renaissance à l’intérieur des solutions spatiales traditionnelles. Cette situation de réception stylistique sélective est d’une certaine manière symptomatique des cités dalmates dans la seconde moitié du XVe siècle. Šibenik, Trogir, Pag – les échos de la Renaissance florentine en Dalmatie centrale Au tout début des années 1460, approximativement au moment où Michelozzo commence à travailler à la fortification de la ville de Dubrovnik, on rouvre à Šibenik le chantier de construction de la cathédrale Saint-Jacques. Après une assez longue interruption due à une crise financière, Georges le Dalmate reprend sa charge de maître d’œuvre là où il l’avait laissé et poursuit la construction de son œuvre la plus importante et la plus ambitieuse, qui est aussi la seule qui porte sa signature – l’abside de la basilique Saint-Jacques – au-dessus des imposantes substructions d’un sanctuaire déjà très surélevé. C’est à peu près à la même date, fin 1461 ou début 1462, qu’arrive à Šibenik depuis Padoue le peintre Giorgio Schiavone (Juraj ulinovi), élève de Francesco Squarcione et futur gendre de Georges le Dalmate. Il rapporte une collection de dessins dans laquelle il a rassemblé au cours de ses études une kyrielle de motifs ornementaux les plus divers, inspirés de l Antiquité, et une autre de riches accessoires décoratifs où l’on reconnaît l’école de peinture de F. Squarcione. Sensibilisé aux impulsions du nouveau style, Georges le Dalmate connaissait déjà certains motifs de Donatello et de Ghiberti ; il utilise abondamment l’ensemble des solutions décoratives nouvellement arrivées et modernise en partie son projet exceptionnel de chevet en érigeant les murs des absides (fig. 6). Dans la phase précédente du chantier de construction (1441-1456), Georges le Dalmate avait déjà introduit dans la forme traditionnelle gothique du chevet à plan polygonal certains éléments décoratifs et figurés de la sculpture de la première Renaissance. Toutefois, comme le montrent ses érotes all'antica, placés sur des colonnes d’angles richement moulurées et ornées d’incrustations de brèche rose (1443), ou encore la frise de visages individualisés et grandeur nature qui ourle le sommet du haut socle du chœur, il n’a pas troublé par cela de manière importante l’impression d’ensemble qu’offre cet édifice construit dans l’esprit du « gothique fleuri » vénitien le plus moderne et le plus représentatif de l’époque. Bien au contraire, il a commencé l’une des réalisations les plus prestigieuses et les plus extraordinaires du gothique tardif vénitien, dans le goût du « maniérisme du gothique finissant » mais d’un caractère singulièrement personnel. Quoi qu’il en soit, Georges n’a pas promu le style Renaissance par son projet du début des années 1440 ; il n’a pas non plus anticipé les phénomènes stylistiques, comme on l’a trop souvent affirmé. Moins encore que dans ses sculptures figuratives, il n’a réussi qu’à « enrichir son dialecte personnel plus que coloré de parler vénitien de quelques phrases toscanes ». Malgré tout, comme en témoigne son activité ultérieure à la cathédrale, la syntaxe complexe du style Renaissance lui demeurera étrangère jusqu’au bout. Après 1460, il ne bâtit pas le parement à pan coupé des trois absides polygonales d’une manière classique, mais il assemble de massifs blocs de pierre en les montant un peu à la façon des constructions en bois – il encastre, entre des pilastres d’angle, de larges plaques épaisses, décorées de niches cannelées peu profondes couronnées par une coquille, puis il les coiffe de lourdes architraves lisses, monolithes. Le motif des niches à coquille peu marquées, que Georges le Dalmate utilisait déjà dans la sacristie qu’il avait construite antérieurement, a été élaboré par Ghiberti ; Georges en décore aussi l’autre face des mêmes plaques de pierre, qui forment ainsi les parements internes de l’abside. Conservant les mêmes techniques de construction mais modifiant le système décoratif, il entame la nouvelle phase du chantier à l’emplacement le plus sensible : la jonction de l’abside nord et du mur gouttereau construit auparavant (fig. 7). Là, par-dessus une haute frise impressionnante de têtes sculptées, entre un pilastre somptueusement décoré d’amours et la lésène plate de l’extrémité du mur gothique préexistant, Georges insère un mur rythmé par des pilastres cannelés et orné d’une paire de « niches » saillantes en relief, contenant une coquille rainurée et d’où pendent des colliers de perles – motif bien connu des peintres de l’école de Squarcione. Au sommet du mur court une corniche classicisante, ornée d’amours dansant, jouant d’un instrument de musique ou portant des guirlandes ; il décore ensuite d’un motif analogue, avec seulement de petits vases entre lesquels sont suspendues des guirlandes, la corniche sommitale des murs intérieurs de l’abside. Plus tard, alors qu’on est déjà dans la phase terminale de ses travaux à la cathédrale, Georges le Dalmate couronne l’ensemble de la composition des murs et des pilastres avec leurs « niches en relief » illusionnistes, par un grand arc à claveaux de pierre, à l’intérieur duquel il place un tondo contenant un bas-relief de saint Jérôme au désert. C’est d’après le blason du gouverneur de Šibenik S. Malipiero (1465-1468), sculpté sur la clef de l’archivolte, que cet ensemble a été baptisé « partie de Malipiero », bien qu’il ait été élaboré sur une durée un peu plus longue. Tous les motifs déjà énumérés, en particulier les petits amours danseurs et les chapiteaux des pilastres avec leurs volutes feuillues, qui apparaissent aussi, mais modifiés, sur les parements internes de l’abside, ont été littéralement copiés sur l’autel en terre cuite de la chapelle des Ovetari, réalisé par Niccolò Pizzolo et Giovanni da Pisa (1453-1456) dans la chapelle éponyme de l’église padouane des Eremitani, chapelle rendue célèbre par les fresques de Mantegna. Outre quelques autres dérivés typiquement picturaux, ou plutôt des emprunts plus ou moins directs, tout le répertoire indique clairement la source de cet ensemble pleinement Renaissance, résultant d’une sorte de collage : le cercle des peintres et sculpteurs « antiquaires » de Padoue qui avaient étudié chez F. Squarcione, tout près de l’atelier de Donatello, dans les années quarante et cinquante du XVe siècle. Le caractère pictural de ces motifs et leur origine padouane sont confirmés par de nombreux autres ornements qui sont sculptés sur les parements internes du sanctuaire – les têtes de bélier entre lesquelles est suspendue une guirlande peuplée d’oiseaux ainsi que la paire de dauphins buvant de l’eau dans un coquillage. Cependant la preuve la plus directe de leur origine padouane apparaît peut-être dans le petit amour aux formes pleines qui porte une corne d’abondance dans le cartouche courbe de la clef du cul-de-four de l’abside sud – motif connu aussi de Donatello, mais pour la transcription sculptée duquel on ne trouve de source directe que certaines peintures et dessins de l’élève le plus important de Squarcione, Andrea Mantegna. L’accueil de ce nouveau répertoire décoratif varié à la cathédrale Saint-Jacques s’est rapidement répercuté dans la ville voisine de Trogir, à l’occasion de la construction du baptistère de la cathédrale Saint-Laurent (1460-1467). Observant les phénomènes qui avaient lieu non loin de là, à Šibenik, André Alessi, un des plus éminents sculpteurs et bâtisseurs de la province, met très vite en pratique une technique de construction analogue de montage encastré en grand appareil. Il répartit sur les parements internes du baptistère des pilastres cannelés, couronnés par des chapiteaux simplifiés du type Ovetari, et des niches allongées de la largeur des pilastres, peu profondes et cannelées, sommées par une coquille. En plaçant au-dessus des pilastres une première corniche d’amours Renaissance à la manière de Nicolas de Florence, puis une corniche du genre de celles de Georges le Dalmate (avec des feuilles tournées dans les deux sens), puis en couvrant tout l’espace d’une voûte à caissons en berceau brisé, Alessi a, dans ce baptistère de la cathédrale de Trogir, créé la première œuvre architecturale complète du style métissé gothico-Renaissance sur le littoral adriatique(fig. 8). L’arrivée en 1464 de Georges le Dalmate à Dubrovnik, où il ne va rester qu’un peu plus d’un an et où il reprend le poste d’ingénieur militaire de Michelozzo, est d’une importance cruciale dans l’échange des expériences récentes entre le Nord et le Sud. En tant que protomagister des chantiers de construction de l’Etat et qu’excellent sculpteur, Georges le Dalmate participe à l’édification des remparts et des tours, ainsi qu’à la rénovation du Palais des Recteurs, endommagé peu de temps auparavant. Lorsqu’il réalise les impostes insérées dans le portail principal du Palais et qu’il collabore à la construction de la Porte intérieure « de Ponte » (1464), Georges importe plusieurs motifs padouans et donatelliens à l’extrémité méridionale de la Dalmatie. L’un d’eux est le chapiteau à cornes d’abondance entrecroisées, une variante des chapiteaux Ovetari, qui apparaît pour la première fois sur la Porte intérieure « de Ponte », puis sur la Porte extérieure du même nom, avant d’entrer dans le répertoire ornemental foisonnant des tailleurs de pierre de Kor ula. Le bref séjour de maître Georges à Dubrovnik n est pas resté sans conséquence sur le chantier de construction de la cathédrale de `ibenik, d autant plus que c est juste après son arrivée en 1465 que le nouveau répertoire décoratif apparaît soudainement dans la deuxième phase Renaissance de la cathédrale gothique. Enrichie et sensiblement purifiée, cette collection de motifs est présente dans les grandes fenêtres rectangulaires de l’abside principale, et plus particulièrement dans la maturité structurelle de la mise en forme des colonnes élégamment proportionnées et de leurs chapiteaux variés. Elle confirme clairement les contacts de Georges le Dalmate avec les artistes florentins du cercle ragusain. Outre le fait que les grandes baies de l’abside centrale présentent un caractère stylistique unique, bien plus pur, le fût très élancé des colonnes cannelées donne l’impression qu’elles auraient pu ou qu’elles auraient dû être coulées dans le bronze. Cet argument supplémentaire ne permet pas d’expliquer le phénomène de Šibenik autrement que par l’influence directe d’un des décorateurs expérimentés et habiles bronziers de l’école de Michelozzo. Ainsi, c’est grâce à un artiste non conventionnel et au milieu ouvert de Šibenik qu’une œuvre totale d’ornementation architecturale dans les formes matures de la haute Renaissance florentine est enfin réalisée, une dizaine d’années après son prélude à Dubrovnik (fig. 9). Étendant son activité d’entrepreneur à la ville de Pag, Georges le Dalmate importe également le nouveau vocabulaire Renaissance au nord de la Dalmatie, dans la seconde moitié des années 1460. Il y utilise au mieux sa capacité d’entreprise et embauche de nombreux assistants qui sont les véritables maîtres d’œuvre de ses travaux. Georges travaille pratiquement de la fondation de la ville de Pag en 1443 jusqu’à sa mort à la construction d’une série d’édifices publics et religieux d’importance majeure : remparts de la ville, palais des gouverneurs, palais épiscopal et nouvelle église collégiale. On peut déjà retrouver dans les chapiteaux néo-corinthiens des arcades du portique du Palais des gouverneurs, achevé en 1466, l’écho de son séjour à Dubrovnik. Il faut pourtant attendre la construction de la chapelle Saint-Nicolas auprès de l église Sainte-Marguerite, convenue en 1467 avec le patricien pagois Georges Miaoli (Georgius Missolich), pour voir l épanouissement complet de son vocabulaire ornemental modernisé. Sur la base de la composition traditionnelle gothique de l espace  une chapelle comportant deux travées couvertes de voûtes d ogive  il laisse à son élève Radmil Ratkovi toute liberté d utiliser le répertoire de sculpture architecturale et décorative déjà rencontré sur les murs intérieurs de l abside de la cathédrale de `ibenik, sans comprendre toutefois leurs vrais rapports de structure et de proportions. Les pilastres cannelés trop larges de l’arc triomphal, coiffés de chapiteaux asymétriques où il appose de grosses « coquilles », ou encore les minces colonnettes à grandes feuilles d’acanthe qui soutiennent les arcs croisés de la voûte aux angles des travées, témoignent de la véritable vision personnelle qu’avait Georges de la Renaissance (fig. 10). Cette fusion unique d’une structure gothique et de la morphologie Renaissance réalisée à la chapelle Saint-Nicolas représente certainement après le baptistère d’Alessi la limite des tentatives de joindre ancien et nouveau style. C’est également un exemple évident prouvant que la voie menant à la réalisation d’une œuvre architecturale complète, créée dans un esprit parfaitement neuf pour la génération des artistes formés dans la pensée gothique tardive et réalisée selon des principes complètement différents, est impraticable à la base. En dépit de tout cela, cet édifice et d’autres œuvres bâties dans le nouveau style montrent bien que le style Renaissance ne peut s’enraciner puissamment que dans un espace libéré de sa propre tradition, dans une ville venant de naître. La meilleure preuve en est l’ensemble d’extraordinaires chapiteaux de la Renaissance que l’atelier d’Andriji élabore dans les années 1480 pour la basilique à trois vaisseaux constituant la nouvelle église paroissiale, ou plutôt la nouvelle collégiale de Pag. Synthétisant toutes ses expériences passées et assimilant ses nombreux contacts avec des artistes étrangers et avec leur production à Dubrovnik, Marc Andriji sculpte, dans un esprit créatif et novateur exceptionnel, quatorze chapiteaux de type métissé, complètement neufs et tous différents qui, étonnamment, n apparaissent plus ensuite ni dans son Suvre ni dans celle de l atelier familial. Sans utiliser le lexique florentin connu et en n adoptant que la syntaxe ornementale de la première Renaissance, Marc Andriji confirme avec cette réalisation, après le ciborium de la cathédrale de Kor ula, son statut de sculpteur et de décorateur prodigieux, de qualité internationale (fig. 11). En résolvant la tâche hardie et très délicate de l édification de l étage sommital du campanile de la cathédrale Saint-Marc de Kor ula, par la mise en place d une loge en pierre ajourée pour les cloches (1481-1486), le maître Marc Andriji démontre également des capacités d ingénieur et une habileté extraordinaire. L ambition inaboutie de l évêque d Osor Antoine Pal i (1465-1470) de faire une cathédrale de la nouvelle collégiale de sa ville natale, et les finances trop faibles d’une cité qui vit de la production du sel vont rapidement mettre fin au bref épisode Renaissance à Pag. Pourtant ces monuments de l’architecture Renaissance, même s’ils sont inachevés, élèvent le phénomène local de la « Renaissance pagoise » à une échelle plus large, qui dépasse celle de la région. Dans un contexte tout à fait différent, c’est à un étranger, Nicolas de Florence (Niccolò di Giovanni Fiorentino, Nikola Firentinac), que l’on confie la tâche de réaliser non seulement la première Suvre architecturale complète de la haute Renaissance sur la rive orientale de l Adriatique, mais aussi un véritable chef d Suvre. Le contrat que son patron, l operarius de la cathédrale Koriolan ipiko, signe à la place de l’artiste, décrit jusque dans leurs plus infimes détails les dimensions, l’aspect et l’ensemble du décor architectural de la future chapelle du bienheureux Jean Orsini dans la cathédrale de Trogir ; il est conclu à Trogir au tout début de 1468. Ce maître, dont le nom est documenté pour la première fois quatre ans plus tôt à Šibenik, et qui a jusque-là essentiellement accompli des travaux de sculpture de moindre envergure (notamment dans le baptistère de la cathédrale de Trogir), tourne une page totalement nouvelle dans l’histoire de l’architecture Renaissance sur le sol de la Croatie en réalisant la chapelle du bienheureux Jean (1468-1482). Il se montre également sous le jour tout à fait nouveau d’un architecte cultivé, capable de compléter de façon créative son expérience florentine à l’aide des stimuli du patrimoine local de l’Antiquité, et de créer un monument unique de la haute Renaissance hors d’Italie. Même après l’identification de toutes ses formules typologiques et iconographiques, s’élevant dans une symbiose inégalable de la pensée chrétienne et du glossaire classique, la chapelle du bienheureux Jean de Trogir jaillit toujours dans le temps et l’espace de sa naissance comme un sommet isolé, un peu mystérieux, loin au-dessus de toutes les autres réalisations de l’art de la Renaissance sur la côte orientale de l’Adriatique. La chapelle du bienheureux Jean Orsini constitue la réalisation la plus considérable et stylistiquement la plus complète du vaste programme architectural d’embellissement de la ville, mené pendant plus de quarante ans par Koriolan ipiko, le représentant le plus notable du petit cercle humaniste de Trogir, qui est toutefois extrêmement important dans la seconde moitié du XVe siècle. La rénovation qui débute par l achèvement de la sacristie et la construction du baptistère de la cathédrale dans les années 1460, puis par la restauration des deux palais de la famille ipiko, sur le flanc ouest de la place de l Hôtel de ville, se poursuit par la pose du bas-relief figurant la justice dans l’ancienne loggia municipale (1471) et par l’édification de l’église votive Saint-Sébastien (1472), commencée après la peste de 1467. Parachevée par la rénovation de l’ancien Hôtel de ville, elle démontre avant tout, au delà des « ambitions princières » de Koriolan ipiko, la conscience claire qu a ce dernier de la dimension historique de son entreprise. Il ne remodèle que l aspect du centre ville édifié au XIIIe siècle, pendant le « siècle d or » de la commune de Trogir, exprimant par là-même son désir personnel d’imprimer le sceau de sa propre époque à l’emplacement le plus éminent, tout en respectant la valeur des temps anciens et tout en confirmant pour l’avenir qu’il est le véritable rénovateur tant de la ville existante que de ses racines antiques profondes (fig. 12). Dans cette œuvre, pour toutes les entreprises déjà citées, Nicolas de Florence l’a servi presque comme un architecte et un sculpteur de cour. Les valeurs traditionnelles extrêmement fortes et l’importante charge symbolique des monuments anciens alignés tout autour de la place principale de la ville ont sûrement interdit une refonte spatiale plus poussée de la matrice urbaine médiévale. Bien que Koriolan ait probablement eu à la base l’idée d’une Renovatio urbis universelle, inspirée par les réflexions théoriques d’Alberti, celle-ci était tout simplement impossible. C’est la raison pour laquelle la collaboration entre Koriolan ipiko, le patron formé dans le nouvel esprit, et Nicolas de Florence, grand artiste qui aurait pu satisfaire toutes ses aspirations, n a finalement pas renouvelé la conception spatiale du moyen age, mais a donné a un embellissement renaissance appliqué a des formes anciennes. Grâce à un climat social favorable, sensible aux valeurs de la civilisation antique, et à la rencontre heureuse des destins personnels de deux individus exceptionnels, protagonistes principaux des transformations mentionnées, Trogir achève ainsi son second « âge d’or » presque tout naturellement et discrètement, avec ces œuvres réalisées dans l’esprit classique. Sautant la période gothique, la Renaissance conclut ainsi, dans cette ville placée sous la protection du bienheureux Jean Orsini, la période médiévale, main dans la main avec l’art roman. Cette occasion manquée de créer la nouvelle identité visuelle d’un centre ville et de mettre en œuvre une nouvelle valeur symbolique dans l’ensemble d’un paysage urbain, Nicolas de Florence la trouve en 1475, quand on le charge, en tant que maître d’œuvre nouvellement nommé de la cathédrale Saint-Jacques dans la ville assez proche de Šibenik, d’élaborer le projet de l’achèvement de sa partie supérieure. Lorsqu’il arrive sur le chantier de la cathédrale à moitié construite, Nicolas se trouve confronté à une tâche ardue, très peu commode et d’une exigence extrême. D’une part, il doit satisfaire les ambitions élevées des habitants de Šibenik et achever dans le même esprit – c’est-à-dire d’une manière inimitable et unique, pour la gloire de la ville et de l’évêché –cette extraordinaire œuvre architecturale et sculptée de Georges le Dalmate, dont la beauté miraculeuse et « l’art divin de la construction » émerveille déjà les contemporains. En bref, il doit rehausser encore la prodigieuse qualité du chevet bâti en pierre blanche, et créer, en transposant cette qualité à un niveau spatial plus élevé, un signe visible de loin de l’identité de la jeune commune de Šibenik (le siège épiscopal n’a été fondé qu’en 1298). D’autre part, la cathédrale elle-même, œuvre tronquée et inachevée de la vision universelle de maître Georges, et l’histoire de sa composition en plusieurs phases posent une série de problèmes de construction difficiles à résoudre. Il faut harmoniser les différents niveaux d’élévation et relier le haut chevet avec les vaisseaux de la nef, corriger les lignes brisées du tracé des murs dans la partie du chœur et les renforcer par endroits, et, pour finir, unifier tout l’espace et le coiffer d’une nouvelle couverture, dont la forme ne soit pas trop envahissante et qui, à cause de la position urbaine spécifique de la cathédrale, compose une sorte de « façade supplémentaire », la cinquième. L’élaboration formelle de la couverture de la cathédrale, située au pied de la colline Saint-Michel (aujourd’hui Sainte-Anne), isolée de la mer par les murailles et privée de l’axe vertical d’un campanile et donc d’un lien symbolique clair entre le ciel et la terre, signifie bien plus que la simple mise en place d’une toiture en bâtière, comme dans le cas de l’église Santa Maria dei Miracoli de Venise – il s’agit de marquer d’un signe ostensible le visage général de la ville et d’en réunir toutes les perspectives dans un ensemble cohérent et indivisible (fig. 13). En dernier lieu, à un moment où des incendies incontrôlés ravagent fréquemment la ville et où les troupes ottomanes, stationnées dans le bourg voisin de Skradin, peuvent s’avancer jusqu’à ses remparts, il faut empêcher que cette œuvre précieuse et de grande valeur ne périsse en une nuit dans la violence des flammes ou qu’elle ne soit détruite sous les bombardements des infidèles – crucis ac fidem nostre supricissimus inimicis – alors que toute la communauté municipale et ecclésiastique y a investi tant de peine et d’efforts. Conscient de la complexité de la tâche et de ses exigences souvent incompatibles, Nicolas accepte le défi d’élaborer dans un délai de deux ans le projet de la troisième et dernière phase de construction Renaissance de la cathédrale, qui dure jusqu’en 1536. Mettant audacieusement et courageusement en pratique le système de construction en grand appareil de maître Georges, Nicolas met en forme un couvrement d’une voûte de pierre appareillée en berceau grâce au recours a la stéréotomie. Il voûte d’abord les chapelles absidales puis tout le reste de l’édifice ; il fait courir une corniche très antiquisante au sommet des murs gouttereaux afin de mettre d’abord au même niveau deux ensembles antérieurs de construction et de style différents, en les détachant de son nouvel ouvrage. Il aplanit et renforce ensuite par des solutions constructives complexes les parements intérieurs du chœur, et lance au-dessus du vaisseau central et du transept une voûte en berceau, appareillée à l’aide de grandes plaques de calcaire emboîtées dans les arcs doubleaux, avant de couronner l’ensemble de la composition par le carré de la croisée du transept. Il le couronne par un haut tambour-lanterne octogonal et par une élégante coupole très légèrement en pointe, réplique à taille réduite de celle, beaucoup plus grande et plus connue, de Brunelleschi à Florence (fig. 14). Bien que Nicolas de Florence ne parvienne pas à terminer les travaux de la cathédrale de son vivant (il meurt en 1507), et que le chantier se poursuive encore une trentaine d’années, c’est néanmoins sous sa direction qu’est construite la majeure partie qui est aussi la plus exigeante – la croisée du transept avec sa coupole et deux travées du vaisseau central. Cette voûte hémicirculaire a été crée pour donner l’illusion d’un immense reliquaire non pas d’argent, mais de pierre. Son entreprise est d’autant plus réussie qu’en couvrant les collatéraux avec des voûtes en quart de berceau et en utilisant la « façade tréflée » de type vénitien, il trouve une solution presque idéale au problème le plus compliqué : assurer la liaison entre le corps plastique de l’église de section basilicale, et une façade occidentale prestigieuse, conçue selon les principes formels de la Renaissance. Nicolas ne parvient pas seul à cette solution. Il reçoit l’aide du noble patricien de Šibenik, Ambroise Miheti, un éminent humaniste qui, au moment de l élaboration du projet (1475-1477), fait justement des études de grammaire au monastère camaldule de San Michele in Isola où Mauro Codussi vient d achever une belle église qui comporte une façade en pierre blanche d’aspect quasiment identique, la première de ce type à Venise. Comme la forme de la façade naît presque organiquement du corps même de l’église à Šibenik, on a longtemps pensé qu’il s’agissait d’une invention indépendante du maître Georges le Dalmate et de son projet d’achèvement de la cathédrale de 1441, antérieur non seulement à la façade de Codussi (1468-1475/1482), mais aussi à la solution utilisée auparavant par Leone Batista Alberti pour le Tempio de Sigismundo Malatesta à Rimini (1450), connu par la célèbre médaille de Mateo di Pasti – ou que ce type de façade d’église apparaissait à Šibenik de façon indépendante et autonome (fig. 15). Il est vrai que, parmi les quelques dizaines d’église possédant une telle façade qui sont dispersées à travers tout le dominium de Venise, seule celle de la cathédrale de Šibenik est entièrement intégrée au corps basilical de l’édifice. Cependant, cet exemple est également pensé comme un signe conscient marquant l’appartenance au territoire placé sous la protection de saint Marc, le saint patron de la Sérénissime République, qui trouve un emplacement privilégié aux côtés des protecteurs de la ville, saint Michel et saint Jacques, dans le chœur de la cathédrale. Si la « façade tréflée » de la cathédrale de Šibenik, avec son allusion manifeste au coronamento de la cathédrale San Marco de Venise reflète la situation sociale particulière de Šibenik, avec une noblesse locale fortement pro-vénitienne, et le moment historique concret d’un péril ottoman immédiat, on peut alors facilement expliquer son apparition précoce et monumentale par un placement volontaire sous la protection politique et spirituelle de l Etat et de son saint patron. Pour finir, le seul fait que l artium doctor qu est Ambroise Miheti, operarius de la cathédrale, soit à plusieurs reprises envoyé à Venise par la commune de Šibenik, qu’en remerciement de ses bons et loyaux services il reçoive du Doge des terres et quelques privilèges, et qu’enfin on lui fasse l’honneur insigne d’être le seul laïc à être inhumé dans le chœur de la cathédrale, comme Koriolan ipiko à Trogir, offre sans doute possible des réponses claires à la question de son rôle dans la réalisation de la cathédrale et dans l origine de sa « façade vénitienne ». En la considérant dans le contexte chronologique dans lequel elle est réalisée, il faut noter que cette œuvre fait la synthèse non seulement de la tradition architecturale millénaire de la Dalmatie, et des influences vénitiennes directe et indirecte, mais aussi des courants stylistiques les plus contemporains de Florence, ville natale de Nicolas, et plus généralement de ceux de l’architecture toscane des années 1460 et 1470. La voûte en berceau couvrant le plan en croix latine, surmontée par le tambour octogonal et la coupole, représente même pour les cadres italiens une composition très précoce. Après les impulsions initiales possibles de Badia Fiesolana, au début des années 1460, et les solutions un peu antérieures appliquées par Alberti à la cathédrale de Mantoue (1472), et avant les solutions apparentées de Francesco di Giorgio pour celle d’Urbino (après 1480) et l’église San Maria delle Grazie al Calzinaio (1488), la cathédrale Saint-Jacques tient une place importante dans la typologie de ce type d’édifice de culte. C’est pour toutes ces raisons que le sculpteur mais plus encore l’architecte Nicolas de Florence doit être reconnu comme un artiste d’importance européenne. De même, Šibenik doit être identifiée dans l’atlas de l’architecture du quattrocento comme le seul site où la vision picturale du temple chrétien idéal, figuré le plus souvent dans les tableaux et les sculptures comme une simple maquette d’église dans les mains des saints, a survécu et perdure encore de nos jours. L’église Saint-Jacques n’est pas la seule grande réalisation de maître Nicolas de Florence à Šibenik. Peu de temps après avoir édifié la coupole de la cathédrale, en 1502, il reprend le poste de maître d’œuvre du chantier de l’église de la fraternité S. Maria del Valverde, plus connue sous le nom de « Nouvelle église ». Dans la courte période qui précède son décès, Nicolas parvient à construire la partie inférieure des murs gouttereaux de l’édifice à vaisseau unique et à édifier en avant de l’abside la profonde travée de chœur rectangulaire voûtée en berceau, appareillé de la même manière qu’à la cathédrale. Bien que certains détails, comme les simples baies cintrées de type brunelleschien, témoignent de « l’écriture » florentine déjà connue de l’artiste, c’est dans la double archivolte légèrement oblique de l’arc triomphal de l’abside profonde, que l’on retrouve sur les dessins du projet de Michellozzo pour l’église Santa Annunziata de Florence, qu’elle apparaît le plus clairement (fig. 16). L’intense activité de création architecturale aux styles les plus variés atteint son apogée au cours des deux dernières décennies du XVe siècle, et le style Renaissance déjà affirmé commence lentement à s’étendre à un type d’édifice quelque peu réticent et jusque-là le plus imperméable aux stimuli du nouveau style : la résidence de prestige. Simultanément, lorsque l’architecture Renaissance acquiert « droit de cité », elle commence à poindre, certes dans des proportions limitées, dans les milieux qui pour diverses raisons ne participaient pas encore à son développement et à sa diffusion. Zadar et Split sont les deux seules grandes villes dalmates où la Renaissance se manifeste assez tardivement et qui sont en marge des événements jusqu’au début du XVIe siècle. En dépit de l’apparition très précoce du nouveau vocabulaire stylistique et malgré le cercle très actif des humanistes et des latinistes locaux, le style Renaissance ne laisse pas de monument vraiment notable à Zadar avant le début du XVIe siècle. Il se cantonne en général à une modernisation partielle du vocabulaire décoratif sur les monuments existants. Il faut dire que le poids de la tradition s’appuyait sur un nombre exceptionnel d’édifices du moyen age qui ainsi sont demeurés des références. Venise, qui sert d’exemple et d’échelle esthétique dans le nouvel âge, les transpose simplement dans le style gothique tardif fleuri local, comme le surgeon le plus prestigieux de son temps. Si l’on en croit les vestiges conservés, la nouvelle façade de l’église Sainte-Marie-Majeure (1472-1478), construite sur un projet de Pierre Ber i, modifié par le peintre vénitien Vittore Crivelli, qui vit alors à Zadar, a été réalisée suivant la « variante de Georges ». Sa surface décorative riche, dynamique et vibrante, couverte de sculptures dans les niches et sur les corniches à feuillage retourné, reflète au mieux la position un peu « retardataire » de Zadar à la fin du quattrocento. C’est par une sorte d’inversion par rapport aux autres villes dalmates et sûrement sous l’influence de la norme fixée par le palais archiépiscopal et sa nouvelle décoration all’antica, que les éléments du vocabulaire Renaissance se manifestent plus intensément et plus amplement à Zadar dans le domaine de l’architecture civile, dans les maisons et palais des riches bourgeois et des nobles patriciens. Aujourd’hui seuls les maigres vestiges de portails, de fenêtres et les blasons sculptés sur les maisons des nobles familles Passini et da Ponte, ou encore l’ensemble conservé du palais Ghirardini, où de robustes amours étendent de somptueuses guirlandes sous les fenêtres, témoignent du fait que la sculpture figurée jouait un rôle majeur dans le décor architectural, plus que dans d’autres centres du littoral, et que ces parures sculptées étaient généralement de qualité exceptionnelle. Il est certain que parmi les maîtres tailleurs de pierre locaux, seuls les plus éminents et leurs ateliers déjà expérimentés étaient capables d’exécuter ce travail exigeant, et il n’y a donc rien d’étonnant au fait que la partie mentionnée plus haut, stylistiquement pure, soit l’œuvre de Nicolas de Florence et de son atelier de Šibenik. Le travail de l’artiste est documenté par la commande d’un portail pour le monastère de Saint-Chrisogone (1485), mais son influence se fait déjà sentir plus tôt dans le décor architectural de la chapelle familiale des Detrico, édifiée dans l’église franciscaine vers les années 1480. La demande accrue et le charme du style métissé gothico-Renaissance, un peu différent et plus fleuri, permettent aussi à l’atelier, apprécié et connu au loin, des tailleurs de pierre de Kor ula dirigé par Marc Andriji d exporter jusqu à Zadar des produits finis au cours des années 1480 et 1490. Un groupe de tailleurs de pierre, formés dans les nombreuses carrières de calcaire de Kor ula, participe à la rénovation du cloître incendié du monastère des moniales bénédictines en 1480. En 1507, Nicolas `panji, l assistant de Marc Andriji, prépare les pierres pour la construction de la façade occidentale de leur église Sainte-Marie-Mineure, que le bâtisseur de Zadar Martin Filipovi commence à construire a fundamento, au début de l’année suivante. Bien qu’elle ne soit pas parfaitement équilibrée, car elle se soumet à la conception spatiale du vieil édifice, le réseau régulier et orthogonal des pilastres étroits et uniformes, des lésènes et des corniches qui rythment la large façade à sommet « tréflé », ainsi que le décor tendre, un peu sec mais réalisé selon les canons du genre, des chapiteaux témoignent du fait qu’elle s’inspire directement de l’église San Giovanni Crisostomo à Venise, construite par Codussi (fig. 17). Le maître, que les documents mentionnent sous le nom de Jadrin ou de Zadrin comme étant un proche collaborateur de Mauro Codussi, son fante ou garzon, et qui reçoit entre autres pour le maître lombard des sommes destinées justement au financement du chantier de construction de l’église San Giovanni Crisostomo, pourrait bien être la personne à laquelle nous devons cette œuvre exceptionnelle et la composition alors des plus modernes de la nouvelle façade de l’ancienne abbatiale romane des bénédictines de Zadar. Dans la suite de la rénovation extérieure de l église (1529-1534), les artistes splitois Jean Vita i et Dujam Rudii élèvent le mur sud en calcaire blanc, également articulé par des pilastres dont les chapiteaux variés présentent de petits amours-atlantes – motif qui renvoie sans aucun doute à l’influence de la sculpture ornementale de l’école de Pietro Lombardo. Le manque de chantiers de constructions religieuses plus vastes et plus importantes et la faiblesse des impulsions initiatrices de quelques individus éminents font que, malgré des débuts prometteurs, Zadar ne se voit accorder qu’un rôle marginal dans l’évolution de l’architecture Renaissance sur la rive orientale de l’Adriatique. La situation historique et traditionnelle de l’espace de la ville médiévale de Split, qui entre dans le XVe siècle déjà entièrement façonnée par le palais d’un empereur romain, génère des phénomènes analogues dans la réception et la manière dont les nouveaux éléments stylistiques se manifestent. Leur arrivée est retardée et fragmentaire, dépourvue de la réalisation de structures architecturales complètes. On ne s’étonnera donc pas que, l’absence de personnalité artistique de premier plan, de grand chantier de construction et d’un mécène cultivé, et la présence obsédante du palais de Dioclétien n’ont pas permis d’imaginer des schémas qui auraient entraîné une polémique féconde. André Alessi, omniprésent, satisfait presque tous les besoins de la ville. Si Nicolas de Florence réalise dans son œuvre une sorte d’hommage à l’immense patrimoine de la résidence impériale et de ses monuments – la chapelle du bienheureux Jean Orsini – il le fait dans la ville voisine de Trogir. C’est seulement à l’extrême fin du XVe ou plus probablement au début du XVIe siècle que la noble famille Grisogono introduit la façade blanche et lisse de son prestigieux palais, au-dessus des grandes arcades ouest du péristyle. Rythmé par de simples fenêtres arrondies encadrées par des pilastres cannelés et sommés de chapiteaux portant les symboles héraldiques familiaux, le palais s’intègre de façon retenue et discrète dans l’espace sanctifié du péristyle, vestibule monumental de la majestueuse cathédrale. On retrouve le même rapport de renoncement face à un environnement symbolique sensible dans la petite église Saint-Roch, construite en 1506 à l’extrémité de l’aile est du péristyle. Avec ses dimensions modestes, ses proportions et son fronton simplement couronné en demi-cercle, elle prend place sans se faire remarquer, presque mimétiquement, sous un arc disparu de la file des grandes arcades. L’espace sacralisé de la ville médiévale ne lui laissant pas la possibilité d’intervenir plus largement, la Renaissance se montre là, peut-être dans l’ambiance antique la plus inspirante de tout l’Adriatique, loin de son vrai rôle rénovateur et explorateur, comme si elle n’était qu’une étape de passage bienvenue dans la sauvegarde des valeurs spirituelles et symboliques du passé. Le littoral croate du Nord-Est, l’Istrie – dans l’orbite immédiate de Venise Un peu plus au Nord, dans le haut Adriatique, le nouveau style s’affirme d’abord sur l’île de Pag puis sur celles du Kvarner, au début des années 1480. Les grands chantiers de construction de trois spacieuses basiliques à trois vaisseaux, une cathédrale et deux collégiales qui auraient dû devenir des églises épiscopales, autorisent la première réalisation intégrale et vraiment complète de l architecture Renaissance. L évêque d Osor Antonio Pal i (1465-1470) tente de fonder un évêché dans sa ville natale de Pag ; il s’emploie à édifier et à équiper de mobilier une des collégiales déjà citées, avec de grandes ambitions. Toutefois, on finit par la consacrer encore inachevée, en 1487, et sa façade est édifiée et décorée jusqu’au début du XVIe siècle, déjà à l époque avec des sculptures à moitié terminées. À Osor, petite ville antique de l île de Cres, l évêque Pal i commence également à construire une nouvelle cathédrale, mais avec beaucoup moins d enthousiasme, si bien que de son vivant le chantier ne dépasse pas le simple chevet à triple abside. Avec l’arrivée sur le trône épiscopal d’Osor de l’évêque cultivé Marc Nigris (1474-1485), un noble vénitien, la construction de la cathédrale adopte un nouveau rythme. Ce dernier fait venir de Venise pour les besoins de l’entreprise l’architecte et maître-bâtisseur lombard Giovanni da Bergamo, qui est mentionné comme assistant de Codussi sur les chantiers des églises de S. Michele in Isola et de S. Zaccharia. Le maître, qui rénove également le palais épiscopal d’Osor, terminé en 1481, prend pour modèle la basilique à trois vaisseaux bâtie par Codussi sur l’île toute proche de Venise, dont il copie pratiquement les dimensions. Il en reproduit dans une version quelque peu simplifiée toutes les caractéristiques principales : les deux files de quatre piles des colonnades des vaisseaux, les chapiteaux composites schématisés et la « façade tréflée », immense mais totalement dénudée (fig. 18). Ses larges proportions, son intérieur clair et vaste, ainsi que la simplicité et l’harmonie de sa façade bien proportionnée que décore un portail monumental, font de la cathédrale Saint-Nicolas d’Osor la première et la seule variante complète de la basilique Renaissance de type classique sur la côte orientale de l’Adriatique. La cathédrale, achevée sous le successeur de Nigris, l’évêque Giovanni Giusti, par la mise en place d’œuvres du sculpteur vénitien Giovanni Buora, est consacrée en 1494 (fig. 19). Cette réplique modeste de l’église vénitienne, adaptée au contexte local, trouve sur la même île un écho beaucoup plus terne dans la collégiale à trois vaisseaux Notre-Dame, dans la ville de Cres. En effet, la malaria endémique pousse dès le milieu du XVe siècle les habitants d’Osor à quitter progressivement leur cité, et Cres devient le centre administratif de l île et du diocèse. C est là que résident le gouverneur vénitien, le chapitre collégial et même par moment l évêque Pal i. C est pourquoi la nouvelle paroissiale de Cres, que l on édifie en même temps que la cathédrale d’Osor, reprend de facto une grande partie de ses fonctions. L’ambition de prendre possession du siège épiscopal s’exprime de manière assez franche dans l’architecture de l’église, par l’imitation de l’intérieur de la cathédrale d’Osor et par une réplique presque textuelle de son prestigieux portail. Le maître Francesco, mentionné en 1488 dans des documents se rapportant à l’achèvement du portail, est très certainement le constructeur et tailleur de pierre François Marangon, connu ultérieurement à Cres. Selon toute vraisemblance c’est aussi le maître homonyme qui est cité aux côtés de Giovanni da Bergamo sur les chantiers de construction de Codussi à Venise. C’est donc là encore un des tailleurs de pierre lombards, dont l’existence est confirmée par les archives, qui arrivent sur l’île de Cres, attirés par le travail, et qui s’y établissent. Important sur les îles du haut Adriatique toute une série d’ornements bien reconnaissables de la haute Renaissance lombardo-vénitienne (en premier lieu le motif de la lunette en coquille), ce groupe de bâtisseurs et de tailleurs de pierre immigrés construit à partir de la fin du XVe et pendant la première moitié du XVIe siècle une kyrielle de maisons et de palais, qui ne sont pas encore suffisamment étudiés, sur les îles du Kvarner. La petite église funéraire de Saint-François de Korm ar à Rab représente un monument unique, où fusionnent des influences et des impulsions variées, résultant d une destinée personnelle et d un parcours de vie inhabituel. À son retour de Hongrie, où il a travaillé au palais royal de Mathias Corvin à Buda, avec Jean le Dalmate (Ivan Duknovi) et plusieurs tailleurs de pierre dalmates, après un début d activité à Trogir, puis probablement aussi à `ibenik, le maître Pierre Radov Trogiranin élève en 1490 devant la petite église à vaisseau unique de forme traditionnelle une façade à la dernière mode vénitienne, couronnée par trois lunettes identiques, arrondies en coquille et étagées en pyramide, solution connue depuis la Scuola di San Marco (fig. 20). Alors que dans la composition générale, il suit les modèles vénitiens, il met en pratique le fruit de ses expériences antérieures dans le décor sculpté et de ses contacts avec les plus habiles maîtres toscans et romains du palais de Buda. Ainsi, le voile en relief, magistralement ciselé sur le linteau du portail et qui se distingue nettement dans l’ensemble de la plastique ornementale, pourrait être un écho de sa rencontre avec Jean le Dalmate qui s'est probablement arrêté très brièvement à Rab, en se rendant à Venise. Maître Pierre installe durablement à Rab et y réalise encore quelques œuvres de taille de pierre et de sculpture, dans la même manière mais sensiblement plus ternes. La rencontre féconde de ces deux centres artistiques, celui de Venise et celui des ateliers de Buda par l’entremise de l’Italie du nord, se répercutera à travers un répertoire inhabituel accumulant les motifs ornementaux dans les fenêtres du Palais des gouverneurs de Rab ainsi que dans nombre d’édifices profanes et religieux construits sur les îles du nord de l’Adriatique au terme du XVe siècle et au début du XVIe siècle. Comme en témoignent la prestigieuse « cour des lions » – l’atrium bien conservé d’une maison Renaissance de la ville de Senj – et plusieurs détails de plastique architecturale d’origine antique, on trouve également dans ce port du royaume hongrois sur l’Adriatique croate des traces du séjour de maîtres dalmates, à la recherche d’un emploi à leur retour de Buda, qui s’y sont succinctement arrêtés, important ainsi dans la région de l’Adriatique nord l’art du travail de la pierre et les nouvelles impulsions stylistiques. L’Istrie est, dans le système de la Terraferma vénitienne, directement rattachée à la Sérénissime République ; les villes de sa côte ouest, privées depuis longtemps de toute autonomie et très appauvries, faubourgs portuaires à la périphérie de Venise, n’offrent qu’un pâle reflet des événements culturels et artistiques qui ont lieu au centre de la lagune. La Renaissance s’y manifeste par conséquent un peu plus tardivement, fragmentairement, sans suite et sans création importante, puisque le « gothique fleuri » a épuisé les faibles ressources économiques et sociales dans la construction de quelques édifices de prestige. Ce tableau n’est sensiblement modifié que par l église paroissiale de Svetvin enat et par l aménagement urbain et architectural planifié autour de la place principale de cette petite bourgade du centre de l Istrie (fig. 21). À la fin du XVe siècle, dans le cadre d une agglomération unifiée et programmée, la famille vénitienne Morosini édifie d abord sur son fief de Svetvin enat un château-fort monumental, le Kaatel (1485), puis, en bordure de la place principale rectangulaire, une loggia, une nouvelle église paroissiale et une série de maisons d habitation type, à un étage, avec un escalier extérieur et un grenier peu élevé. Les équilibres spatiaux sont clairement définis et le schéma de proportion est fondé sur le principe de la répétition de rectangles dont les côtés présentent un rapport de 5:3 – élément de composition primaire de l’ensemble du projet, repris à différentes échelles et dans différentes tailles pour les dimensions de la place trapézoïdale, du château-fort et de la paroissiale Notre-Dame elle-même. C’est également la base du schéma de proportion complexe de la « façade tréflée » et de l’élévation générale de cette dernière. Bien que l’on ne connaisse précisément ni la date de la construction de l’église, ni le nom de l’architecte de cette vaste entreprise, quelques autres détails architecturaux réalisés en Istrie permettent de conclure que son chantier débute au plus tard à la fin du XVe siècle, pour s’achever avant 1529, date à laquelle meurt Pierre Morosini, chef du lignage vénitien dont les initiales se trouvent dans les blasons sculptés sur la façade de l’église. Sans aucun doute originaire de Venise, l’architecte s’inspire directement de l’église franciscaine vénitienne de S. Giobba (1470) pour ce qui est de la composition spatiale générale du large vaisseau unique, terminé par un profond chœur à une seule abside, dont l’entrée est soulignée par un arc triomphal saillant. Dans le répertoire standardisé et un peu sec du décor architectural très simple – des demi-chapiteaux ioniques à l’échine dissimulée par un motif d’écailles – il montre en revanche l’influence évidente de l’atelier de sculpture tardif de Pietro Lombardo. Grâce au noble vénitien éclairé Pierre Morosini, à l’importante position stratégique de son fief, ainsi qu’à une série de raisons qui restent encore inconnues, c’est à Svetvin enat, petite bourgade provinciale, que l image de la ville planifiée de la Renaissance se trouve enfin presque entièrement réalisée, après la tentative de Koriolan à Trogir. III. Le XVIe siècle  l « Âge d or » de la République de Raguse et le déclin de la production artistique dans la Dalmatie venitienne Au début du XVIe siècle, dans les villes ressortissant de la Dalmatie vénitienne, on commence à ressentir de plus en plus les répercutions durables de la rupture des liens commerciaux avec l’arrière-pays continental, et encore plus directement celles qu’apportent après une trêve éphémère l’aggravation des circonstances et le conflit armé qui oppose Venise aux Turcs ottomans. Dans les cinquante années qui vont suivre, les commandes privées et publiques sont remplacées par les entreprises infrastructurelles plus vastes de l’Etat, soucieux de la protection de ses terres. Voilà pourquoi dans le domaine de l’architecture de prestige la période se termine dans la région par « l’importation » de plusieurs réalisations importantes de la première Renaissance, la plupart du temps de caractère municipal ou tactique, projetées sur l’ordre de la Sérénissime République par ses fonctionnaires, d’éminents ingénieurs militaires étrangers. Parmi ces nombreux ouvrages défensifs, sa valeur et son importance signalent le fort Saint-Nicolas, bâti à l’entrée du canal de Šibenik en 1540 sur un projet de Gian Girolamo Sanmicheli (fig. 22). La monumentale forteresse triangulaire, érigée sur une falaise de calcaire, est construite par des maîtres locaux, et les sculpteurs François Dismani de `ibenik et Dujam Rudi i de Split réalisent le grand portail de style dorique, d après des dessins d artistes italiens. Presque simultanément, à `ibenik même, en face de la cathédrale alors inachevée, on construit la grande loggia municipale (1536-1542), le plus monumental édifice de ce type qui soit bâti dans le style de la haute Renaissance en Dalmatie. La loggia actuelle est une réplique de celle du XVIe siècle, qui a été détruite par un bombardement pendant la Seconde Guerre mondiale. Malgré tout, avec la petite loggia du côté est de la place et l’immense cathédrale Saint-Jacques, elle constitue encore de nos jours une des compositions spatiales d’ensemble les plus prestigieuses de la Renaissance en Dalmatie (fig. 23). Un espace beaucoup plus réduit, mais particulièrement harmonieux, se constitue au cours des XVIe-XVIIe siècles sur la place qui se trouve près de la porte sud, de terre-ferme, à Kor ula. Il est formé par l Hôtel de ville Renaissance (1521), l église Saint-Michel (1601-1651) et l arc de triomphe aux caractéristiques stylistiques maniéristes, érigé en 1650 en l honneur de Leonardo Foscolo, vainqueur des Turcs (fig. 24). Le style maniériste, par ailleurs rarement représenté en Dalmatie, s est également exprimé à Kor ula dans la mise en forme de la haute et étroite façade du palais Arneri, situé en face de la cathédrale. En 1543, le célèbre architecte de Vérone et ingénieur militaire vénitien, Michele Sanmicheli construit à Zadar la grande porte de ville côté terre-ferme – « Porta Terraferma » (fig. 25) – au sein d’un long tronçon des nouveaux remparts de la ville. Richement ornée de motifs antiques et de bas-reliefs des protecteurs de la ville et de l’Etat, saint Chrisogône et le lion ailé de saint Marc, la grande porte de Zadar, harmonieuse et de belles proportions, représente peut-être la composition la plus réussie de Sanmicheli dans ce domaine. Parmi les réalisations singulières de l’architecture militaire en Dalmatie, il faut mentionner la construction de plusieurs églises fortifiées sur les îles du sud de l’Adriatique. En 1571, à l’époque de la guerre de Chypre, immédiatement après que le bey algérien, vassal des Ottomans, Uluz Ali, a pillé et incendié la ville de Vrboska sur l’île de Hvar, ses habitants entourent d’une épaisse muraille couronnée par un crénelage l’ancienne église paroissiale Notre-Dame, située tout en haut de la ville et de toute façon souvent sujette aux attaques des pirates, et élèvent asymétriquement devant sa façade un sévère bastion de pierre, à l’angle particulièrement aigu et aux parois lisses avec un léger glacis (fig. 26). Pour la même raison l église de Jelsa, sur la même île, est fortifiée à cette époque, tout comme celle du Saint-Esprit à Suura sur l île de `ipan. La République de Raguse  « oasis de liberté et de sécurité » sur l Adriatique Indépendante sur le plan %&'SÓ% B C J K Ó Ô & . Æ î ò ™ œ £ ¤ ¥ ¯ K S m n ‹ Œ £ å è ø © è deØÙÞßîïkz‰ñäÛÐȾȵȵȵȾȬ¤È¤È¤È¤È™ÈµÈµÈ¾È¾È¾ÈµÈ•‹•È…È™È hggPJ h–6 hgg6hggh–hggmH sH h'¤mH sH hgg6mH sH hggH*mH sH hggPJmH sH hggmH sH hgg5:mH sH hgg5mH sH hgg5:CJmH sH hgg5:CJPJmH sH 0&'SŠ23“"”" #·&Z.ê:ë:I;ªDéGZ[^^óÿp#­óÿp#Ôñÿp#Ôëÿp#Š8Pëÿp#sÒléÿp#S 0ãÿp#Ôëÿp#;-@éÿp#ÔÛÿp#§ëÿp#,Ïÿp#1>XÏÿp#4féÿp#¦ãÿp#§Ïÿp#SLlÏÿp#q$Àÿp#ºv¨Ïÿp# ´ÿp#Ô $„Ðdh`„Ða$$„dh`„a$gd+¹ $„dh`„a$$dha$„`„„`„ $ ÆÄdha$"ÀXÀýý‰ŠUVijÆvxÅÎ9º»÷ø+ QRÀÊçðOPwƒŽàÍÜÝù/¦123KUÒÝ6!@!y!‚!“"ôìãìãìÙìÑìÆì¾ì³ì³ìÆìÙìãì¨ì¨ìÙìŸìÙ쨗ìÙìÙ‡ƒì¨ìÙì¨ì¨ìhgghggB*OJQJmH phsH hÌvnmH sH hgg6mH sH hÌvnhggmH sH  j-hggmH sH h*^ZmH sH h–hggmH sH h–mH sH hggPJmH sH hggH*mH sH hggmH sH hggOJQJmH sH 3“"”"´"Û" # #j$v$y&&z'Ÿ'°'·'}(š( (¡({*…*',=,|,Œ,A.W.Y.Z.o..’.“.¼.Ÿ/³/)0‹0“0˜1¤1Ã1è11222¹2Å20313=3i3p3x344µ7¶7c8€8Ë8Õ8(9üóèóÝÕÌÕÌÕÂÕÂÕÂÕ¹ÕÌÕÂÕÂÕÂÕ°ÕÂÕ¹ÕÂÕÂÕÂÕÂÕÂÕ¥ÕÂÕ¹ÕÂÕÂÕ™Õ¹ÕÂÕÂÕhggOJQJmH sH hnszhggmH sH hgg5mH sH hggH*mH sH hggPJmH sH hgg6mH sH hggmH sH hgg:>*mH sH hgg:PJmH sH hgg:mH sH hgg<(9)9þ9Ü:è:ê:ë:1;<;=;I;=¡=/@P@Ô@ï@fAkA©BªBëC÷CD;DJD^DCFNFkGÚGßGàGsH‘H™HœH¡H‰J•JKšKLLæNðNVPiP'T7TST`TöîæÝîÕÐÉÃÐîºîæî¯î¦îöîœîœî¯îœîæîöîºî“ºîœîºî‹î¦îƒîºî¦h+¹mH sH h… mH sH hnsz5mH sH hggPJmH sH hgg6mH sH hnszhggmH sH hgg5mH sH  hggPJ hgg5PJ hgg5hggOJQJhgg6mHsHhggmHsHhggmH sH hggH*mH sH 3`TqWXXYÀYÆYÖYYZcZÖ[ô[\\ß\ê\.]:]H]_]ü]ý]^^.^:^Z^v_ˆ_¥_¬_Ç_È_"a4abb b†bªb d!d‘d¤dÛeîe,fCfÀfÊfËfÌfíföfiijiqi_kikøðøçøÜøçøÒøçøÒøÒøÜøÉøÁ½·½ø®øÜø¢ø®ðÜðøðøçøðøðøÜøçøçøÜø’ðøÜhggB*OJQJmH phÿsH hggOJQJmH sH h+¹5mH sH  hggPJhgghggmHsHhggH*mH sH hggPJmH sH h+¹hggmH sH hgg6mH sH h+¹mH sH hggmH sH 9^Z^™e_k+tˆz2F„¸Šµ“a£P«`¼÷½2ÈhÏpßžåŽé’ìáÆÇ%ùÿp#Ôíÿp#;-@áÿp#0DíííÛíÛÛÛÛÛÛÛÛÛÛÛÛÛÙÓÛ„`„„`„ $„Ðdh`„Ða$ $„dh`„a$„`„ik0mCm¥m¦m¯m¿nÀnÄoËoBrUr ss²váv˜w™w´{À{›}·}Ê}ô}~€~†~ '12GZ;€H€Œ€ž€ÅÌx„†„7†C†¤‡·‡PŠfŠðŠ‹,‹8‹Œ Œ ŒŽšŽ®Ž¾ŽÀŽÒŽ\xä’øðøäðøäøðøðøÛøÑøÈø¿øÑðø·ø·øÑ¬ø¢ø·øÛø·ø·ø·øÑø·øÑø·øÑø·ø·ø·øÛøÛø¬øhggCJmH sH h|hggmH sH h|mH sH h+¹5mH sH hggH*mH sH hggPJmH sH hgg6mH sH hggOJQJmH sH h+¹mH sH hggmH sH @ä’ö’“˜“ž“³“÷“”V”\”]”f”@–k–½–¿–——˜˜€˜’˜.™4™:™(šhš.28:L¢²P R l p ¡¡t¡z¡Š¢–¢Æ¢Þ¢ì¢î¢£_£ž£±£²£³£Ò£Ó£ä£ ¤õíåíÛíÛíåíõíÛíÛíÛíõíõíõåíåíÛíÒÉÒíÀí´íåí¤íåíÛíÛ—ÛíÛíÉÒí“íåíhggh|hggPJmH sH hggB*OJQJmH phÿsH hggB*mH phÿsH hgg6mH sH h|5mH sH hgg5mH sH hggPJmH sH h|mH sH hggmH sH h|hggmH sH : ¤¸¤Œ¥ž¥®¦Ï¦0¨G¨M¨b¨.©5©…©˜©wªxª«N«P«¬­’­h°Š°J³L³$´4´µ(µRµeµÙ¶è¶d¸n¸¤¸Ê¸Î¸Ø¸è¸ð¸ò¸,¹.¹h¹æ¹è¹5º »À»Ã»Ï»ä¼ ½½*½7½C½X½_½s½>¾E¾I¾öîåîÚîöîöîåîöîÎîöîÚîÅîÁîÅîÚîÚî¹îåîÚî¹î¹î¹î¹î±¹±¹î±îöîÁ±îÁîÁªÁî±î hÇbehgghÇbemH sH h|mH sH hgghggH*mH sH hggB*mH phÿsH h|hggmH sH hgg6mH sH hggmH sH hggPJmH sH @I¾O¾ÿ¾¿‘¿™¿¿¯¿FÀWÀSÁXÁ’Á™Áh€ÇèŮŞÇËDŽȋȟɦɨɯɽÉÊÊÊÅËÕËÍ¢ÍÔÎïÎgϹÏÀÏòÐÿÐÑ^ÑÒÒðÔÕËÕÒÕ ××‹×Ž× Ù+Ù’Û¬Û¼ÛÌÛàÛòÛÝÝ&ÝÞ¾àîà ááä%äõíõíõíåíõíõíåíõíõíõíÜíåíåíåíåíåíõíåíõåíõíÒåíÉÀíåí·íÜíõíÜíÜíåíÜíåíåíõíåíåhHLO6mH sH hgg5mH sH hHLO5mH sH hggPJmH sH hgg6mH sH hHLOmH sH hggmH sH hHLOhggmH sH H%äªä¶äûä;ååžåååøåççeçmçéŽé­éÖéêê+ê±ê¸ê¹ê ëžë#ì2ìUìbì‡ìˆì‘ì’ì,ící€ííãíöíøíˆîÂîÍïÎïððôðñUòaòóó<ózóêöøïøëøßø×ø×øÌøÃø¸ø¯ø¥š¥ø¥ø¥ø¸ø¯øßø¥ø¯ø’¸’¸øÃ‰Ãø’øïøïø¥øhËJ/5mH sH hËJ/mH sH hgg6PJmH sH hggPJmH sH hggH*mH sH hËJ/hggmH sH hgg5mH sH hHLOhggmH sH hHLOmH sH hggOJQJmH sH hgghgg6mH sH hggmH sH 6êöîö÷÷†ø“ø6ú>úzüˆüÀüÂüþ þZ`gm¨­±·ü®ºä5KLet_n™§ÐÒõù #0:pxÚßò¸ ¹ ß à   í õíåíÛíÓíÓíÓíÊíÊíÊíÊíÊíÓíÛí¿í¶í¿í¿íÓíÓíÓí®¦®¦®¦®¦í®íœí¶í¶íhggCJmH sH hàaxmH sH hä èmH sH hggH*mH sH hhggmH sH hgg6mH sH hmH sH hggPJmH sH hËJ/mH sH hggmH sH hËJ/hggmH sH 9í ï ³ ¾ ÆÇø VlK^JSCQÀËð ·¸  :!C!Ï!×!à!á!â!¿#Ë#r$s$˜$™$ %&p(®(¦)ª)´)Ö)**¦,µ, --.///I/J/°/õíãíßÖíËíãíÂíÖíËíËíãíËíÂí¹í¹í°ÖíÖíãíÂíÂí¤íœíÖ°ÖíËí”í”íÂíÂíh¥6ìmH sH hä8*mH sH hggOJQJmH sH hä8*5mH sH hgg6mH sH hggH*mH sH hä8*hggmH sH hgg5mH sH hgghggPJmH sH hggmH sH hàaxhggmH sH :°/¼/\0c0^1_1ƒ11Ç23V445€5‚5Ú6æ6c;d;ž; ;¥;­;Ò<ê<z>}>¤@AhAjAlA‚A„A:B;BJBKB'E‚EžE0F„FœFöîæîÚîÑîöîÆî½îÑî½î´«´îÆîæîöîÚ¢—‚vvkhgg5CJmH sH hggCJPJmH sH hggCJH*mH sH hggCJmH sH hgg:>*mH sH hgg:mH sH h¥6ì5mH sH hgg5mH sH hggH*mH sH h¥6ìhggmH sH hgg6mH sH hggOJQJmH sH h¥6ìmH sH hggmH sH hggPJmH sH *%_1W>jAlA;BvR.W0WÎWÜ‘•ƒž„žôžl§ã¿"Àù÷ùùïãã×ÏããããÉĸ¸¬ $„dh`„a$ $„dh`„a$$a$„`„$dha$ $„Ðdh`„Ða$ $„dh`„a$$dha$„`„œF-GHZJeJ¦J§JÇKÓK’L”LžL LŽM¦MJObO¥P·P;RuR›RœRRžRªR«R´RµR·R¸RÁRÕRSSS S S*Sö’ø’g•h•o•p•¶•X–¢–¦–ЖÒ–ä–ò–ĘƘ|™~™€™‚™››$›%›ÈœÊœƒž„žÓžÔžÕžßžçžôž+Ÿ7Ÿ6 [  ¡"¡{¢†¢­¢Í¢Ó¢Ô¢‰£•£À£Í£E¥]¥g¥öìöìöìöìöìáì×ìáìöìöìáìáìáìáìÓÌÅÀ̷̯¥¯¥¯¯¥¯¥¯”¯¥¯¥¯¥¯hggH*mH sH hÞNmH sH hggPJmH sH hggmH sH hgg5:PJ hgg5 hgg5H* hgg5:hgghÞNCJmH sH hggCJH*mH sH hggCJmH sH hggCJmHsH6g¥œ¥ ¥«¥ï¥¦¦-¦³¨´¨تÙª®´ü´µX¸ޏe¼q¼ƼɼͼÔ¼å¼æ¼‘¾œ¾"À$À0À2À4À6À8À<À>ÀJÀLÀNÀPÀRÀVÀXÀZÀõíãíãÖãíÍíÍíËíãíõíÂí¹ÂíÂíãí¯©¯ž¯©š¯©¯¯©š‹íhT|íhN0JmHnHuh¥6ìh¥6ì0JmHnHu h¥6ì0Jjh¥6ì0JUhÞN5mH sH hgg5mH sH UhggH*mH sH hÞNhggPJmH sH hggPJmH sH hggmH sH hÞNhggmH sH ,s des vieux bourgs médiévaux, comme Ozalj, Ribnik et Veliki Tabor, et on construit une chaîne complète de nouvelles fortifications. Ce n’est que sporadiquement qu’un détail apparaît sur les nouveaux pans de murailles, une fenêtre ou un blason de style Renaissance ; les quelques colonnes toscanes des arcades des portiques intérieurs au château de Veliki Tabor représentent une réalisation rarissime. Ce sont surtout des ingénieurs militaires italiens qui collaborent à l’édification du système de défense ; l’un d entre eux, Domenico dell Alio, s est illustré en construisant les fortifications qui entourent Koprivnica et Vara~din. L imposante forteresse quadrangulaire de Nehaj, qui fut bâtie au-dessus de Senj en 1558 sur l ordre du capitaine des Confins militaires Ivan Lenkovi, est assurément un monument exceptionnel d architecture défensive (fig. 31). À peu près épargné par les ravages du temps et les événements guerriers, son cube de pierre presque parfait, avec quatre échauguettes d angle, domine aujourd hui le paysage au pied du Velebit. Cependant, la construction de la ville fortifiée de Karlovac est certainement la plus monumentale ; elle atteint une portée européenne. Edifiée au confluent stratégique extrêmement important de deux rivières sur l’ordre de l’archiduc de Steiermark Charles II, commandant en chef des Confins militaires, dont elle tire son nom, cette immense fortification monumentale en forme d’étoile à six branches, entourée par des fossés encore renforcés par des bastions saillants en terre, devait être l’ultime ligne de défense de l’empire des Habsbourg (fig. 32). Suivant un modèle italien de N. Angelini, l’édification de la ville-forteresse débute en 1579, sous la direction du bâtisseur Mathieu Gambon, du contremaître Z. Baptista Bianchini et de J. Langenmantel, intendant général de la construction. Le chantier a duré presque deux cents ans et ses contours se devinent encore clairement aujourd’hui dans la ville de Karlovac. À l’intérieur des remparts, la ville était partagée en parcelles carrées régulières autour de la surface libre de la place centrale, ce qui explique qu’on la mentionne souvent comme une des réalisations de la « ville Renaissance idéale ». Pourtant, ce grand camp militaire moderne, à l’organisation simple, dont tous les habitants sont les otages de l’état de guerre, est certainement très loin des idéaux et de toutes les exigences de contenu que les visions humanistes avaient imaginés dans l’environnement urbanisé, aménagé pour l’homme du nouvel âge. Predrag Markovi PAGE 1 PAGE 1 "À8À:À<ÀRÀTÀVÀXÀZÀöðîöðp#¬îîâ $„dh`„a$„h]„h„øÿ„&`#$,1h°‚. °ÆA!°‰"°‰#‰$‰%°°Ä°Ä Äœ@@ñÿ@ NormalCJ_HaJmH sH tH L@L Heading 2$dh@&5\mHsHuZ@Z Heading 3$$„Ðdh@&`„Ða$5\mHsHuDA@òÿ¡D Default Paragraph FontVióÿ³V  Table Normal :V ö4Ö4Ö laö (kôÿÁ(No List H™òH  Balloon TextCJOJQJ^JaJ>@>  Footnote TextCJaJ4 @4 Footer  Ƹp#F>@"F Title$a$5;CJmH sH tH u\C@2\ Body Text Indent$„Ðdh`„Ða$ mHsHuPP@BP Body Text 2$dha$5\mHsHu.)@¢Q. Page NumberOÄÿÿÿÿ  ÿÿ"&£ ÿÿ"&£ ÿÿ"&£ ÿÿ"&£ ÿÿ"&£ ÿÿ"&£ ÿÿ"&£ ÿÿ"&£ÿÿ % ™‹!f-š8uD›PØ[OúúÏ„[ á2&'SŠ23“” ·Z&ê2ë2I3ª<é?ÐN|Q}QÐQDW ]Öe3lÝpuzšj‹Y’ÚqŸ¬©â°Ã¼©Â™ÆÉ¿Ý¤æ¥æòæí÷LD ¢ £ (˜þÿNm#ó,0ˆ6‰6ù6q?èNùNOOOOOOO˜0€€p˜0€€0€€˜0€€˜0€€M90€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€p˜0€€˜0€€(0€€˜0€€p˜0€€p˜0€€p˜0€€˜0€€p˜0€€˜0€€p˜0€€˜0€€˜0€€p˜0€€˜0€€p˜0€€˜˜0€€˜0€€p˜0€€p˜0€€p˜0€€˜0€€˜0€€p˜0€€˜0€€˜0€€Ð€˜0€€p˜0€€p˜0€€p˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€˜0€€p˜0€€˜0€€p˜0€€˜0€€˜0€€p˜0€€pfx¯¡My0µMy0µMy0µ0€€˜@0€€˜@€€˜€€ Oš€€ Ûw ‰“"(9`Tikä’ ¤I¾%äêöí °/œFN‚ö’g¥ZÀ¬¯°±²´µ¶·¸¹º»½×ØÙ^%"ÀZÀ­³¼áXÀ® !Ôÿ•€!Ôÿ•€ÆÌÍÕ×áåî8<ÙúAH W_z}¼ÂÃËjoy{"…"þ1_2`2è2ë2<3=3I3~4…4.53545>5L6[6/8P8m?©?ª?Ú?s@z@AA×EÜE»F¾FHH0I7ISI`I0K7KwL~L(M-M1M8MAMJMKMPM¯N²N~OˆO}Q„Q†QŒQQÐQiRoRxT~T«T°T²T¹TdXjXkXuX6a†E†§‡®‡÷‡ú‡û‡þ‡ÙˆÜˆÝˆàˆA‰H‰º‰¾‰¡Š¤Š&‹-‹¼‹Û‹Ü‹â‹ã‹í‹ÏŒØŒêŒòŒôŒùŒÍÓæìVŽ\ŽêŽðŽz‘€‘7“?“A“F“…“‹“•”š”s•“•––––ä–ê–ú–—®™¶™â™ë™ì™ñ™‘š™š›š š’œ˜œ_ž„ž¥ž±ž¿žÙžÚžíž+Ÿ1ŸZ ` p¢v¢Ï¦Ô¦ß¦ç¦1¨8¨©©©!©"©'©(©.©/©<©=©E©?®O®Ð²Ö²á²ç²w³z³{³‚³•³œ³{´´BµIµ«µ±µµµ¿µüµ¶¶ ¶?¶E¶ê¶ò¶·%·Ù¸ß¸¹ ¹¹ ¹_¹e¹©º¯º°º¶ºÇºÍºÐºÙº)»/» ¼¼¼¼¼$¼K¿P¿Q¿Z¿<À?ÀFÀKÀLÀRÀVÀ_ÀwÁ}ÁÂFÂà íðñùÃUÅcÅ2Æ=ÆLÆQÆRÆ\ÆÍÍîÎøÎPÐWÐЗÐÓÓhÓxÓêÓñÓæÔéÔêÔíÔþÔÕ«Õ®Õ¯Õ²Õ$Ö)Ö@ÖGÖ›Ö¯ÖÒÖÚÖôÖþÖ××Þ׼ؿØÉØÓØíØôØ8Ù>ÙEÙKÙyـنًÙÙ•ÙÚ"Ú,Ú6ÚSÛ[ÛaÛeÛlÛqÛrÛvÛõÛÜá–áâ âPçSç¡è¥èóèöè"ê&êIêMê@ëDë^ëdëì!ì6ì=ìdìkìì—ìªì³ìëìïì=íDí`ïdïððpðuðWñ[ñ¯ñ³ñÜñàñ«ò¯òãòçòÈóÌó·ô¿ôØôÜô=õDõjõqõööªö½öø!ø"ø$øùù;ùBùŒù’ù¯ùµùÈùÍùÎùØùÄúÊúÎúÑúÌûÐûõýùý¸ÿ¼ÿ¦ªpz  .56:>JZ`™} ƒ › ª ì ó ô ø  — š   QWquv~#*06:?@DÁǯº¾ÁÂÅU[ÇÎ  *Ûå¿Àä÷/L¶ºàç_g‰ŽåèøüÿM Ù€ ˆ ‘ — ñ#ø#e$p$µ$¿$A%G%R%X%Ü%ã%ä%è%é%ì%ï%÷%)&0&ç'í'( (W)^)q)y)+ +M+Z+, ,,!,",),-,3,Ù,Þ,â,é,M-\-½011€1†1‹1“1•1š1Ó1Ù1å1ë1ÿ12 222"2#2'2w2~22–2š2Ÿ2 2¤2Å2Æ2¾3Ì3Ó3Ú3ö3ü3:5A5D5J5K5P5‰6Ù6Ú6ù6889'9¥9ª9?@ABCDEFGHIJKLMNOPQRSTUVWXYZ[\]^_`abcdefghijklmnopqrstuvwxyz{|}~€‚ƒ„…†‡ˆ‰Š‹ŒŽ‘’“”•–—˜™š›œžŸ ¡¢£¤¥¦§¨©ª«¬­®¯°±²³´µ¶·¸¹º»¼½¾¿ÀÁÂÃÄÅÆÇÈÉÊËÌÍÎÏÐÑÒÓÔÕÖרÙÚÛÜÝÞßàáâþÿÿÿäåæçèéêëìíîïðñòóôõö÷øþÿÿÿúûüýþÿþÿÿÿþÿÿÿýÿÿÿýÿÿÿýÿÿÿ þÿÿÿþÿÿÿþÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿRoot Entryÿÿÿÿÿÿÿÿ ÀF°ž9^ÂÄ€1Tableÿÿÿÿÿÿÿÿãá*WordDocumentÿÿÿÿÿÿÿÿ.ÄSummaryInformation(ÿÿÿÿùDocumentSummaryInformation8ÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿCompObjÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿjÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿþÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿÿþÿ ÿÿÿÿ ÀFMicrosoft Word Document MSWordDocWord.Document.8ô9²q